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des journées. La joie était partout, à cause de nos bons cantonnements, mais notre demi-brigade fut désignée avec un régiment de chasseurs à cheval pour aller du côté de Venise.

Le général qui commandait cette expédition n’avait qu’un bras. Il fit faire des lanternes pour nous faire marcher de nuit, et le jour nous restions cachés dans des roseaux. Il fallait faire des petits ponts sur des grands fossés pour passer notre artillerie et notre cavalerie ; ce ne sont que marais et chaumières de pêcheurs. À force de courage, nous arrivâmes au lieu désigné. C’était une forte rivière avec une chaussée la séparant de la mer ; cette rivière va se joindre à quatre autres qui tombent aussi dans la mer et forment la patte d’oie. Il fallait prendre toutes ces rivières pour être maître des eaux douces.

Sur la grande chaussée était un corps de garde autrichien à l’avancée ; des redoutes à un quart de lieue faisaient face aux rivières. On plaça un factionnaire sur la chaussée ; le factionnaire parlait allemand et fit connaissance avec le factionnaire autrichien. Le nôtre lui demanda du tabac, et l’allemand lui demanda du bois. Le nôtre lui dit : « Je vous en apporterai avec deux de mes camarades lorsque je serai descendu de faction. » Voilà nos grenadiers partis avec du bois ; les autres leur apportent du tabac. Le lendemain on leur promit une grande provision