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LES CAHIERS

décarrelées ainsi que les écuries. Partout des cachettes ! partout des vivres ! Les Russes mouraient de faim aussi, et ils venaient mendier des pommes de terre à nos soldats ; ils ne pensaient plus à se battre, et nous laissaient tranquilles dans nos quartiers. Ce malheureux hiver nous coûta bien des souffrances.

Voyant un paysan regarder dans un jardin tous les matins, j’en fis la remarque et je fus sonder. Je rencontre un objet qui faiblit, je vais prévenir mes camarades. De suite à l’œuvre, nous découvrîmes deux vaches pourries ; c’était une infection. Mais, sous ces charognes, il y avait de gros tonneaux remplis de riz, de lard et de jambon, avec tous les outils du village : scies, haches, pelles et pioches, enfin tout ce dont nous avions besoin, et du raisiné pour notre dessert. Je sautais de joie d’avoir persisté à enlever ces maudites charognes (le cœur en sautait ) ; on en fit la déclaration à nos officiers ; cela donna plus de quinze cents livres de riz et des bandes de lard. L’Empereur voyant la fonte des neiges, fit venir ses ingénieurs pour dresser un camp dans une belle position en avant de Finkenstein. Des lignes furent tracées en forme de carré. Au milieu, une place pour faire un palais qui fut bâti en briques. Le plan fait, on alla chercher des planches pour nos baraques. Dans ce pays, les enclos sont fermés de gros poteaux et de planches de sapin de vingt pieds de long