Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/260

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Il me reçut avec amitié, et dit qu’il fallait me donner de suite un ordinaire de dix-neuf hommes et y mettre sept vélites des plus négligents, mais des plus instruits. « Il les dressera, dit-il au sergent-major, et ils lui montreront à lire et à écrire. Je vous charge de cette bonne œuvre ; il le mérite ; il nous a sauvé la vie ; c’était toujours à son bivouac que nous trouvions à manger ». Je rendis visite à M. Belcourt qui se rappela l’empressement avec lequel je lui avais remis une montre perdue. (Le voyant chercher au galop en arrière, je lui avais dit : « Où courez-vous, major, vous avez perdu votre montre, la voilà ! » )

« C’est de ces actions que l’on n’oublie pas, dit M. Belcourt. Allez, faites bien votre service ; vous ne resterez pas là. »

Dieu, que j’étais content de cette belle réception ! Me voilà donc chef d’ordinaire de 12 grognards et de 7 vélites instruits ; le sergent-major leur fit la leçon, car ils partirent de suite chez le libraire pour m’acheter papier, plumes, règle, crayon et un vieil évangile. Me voilà bien surpris de voir sept maîtres pour un écolier : « Eh bien ! me dirent-ils, voilà de quoi travailler. — Moi, dit le nommé Galot, je vous ferai des modèles. » Et le nommé Gobin dit : « Je vous ferai lire. — Nous vous ferons lire chacun à son tour, dirent-ils. — Allons ! je vous aime tous, leur dis-je. Je vous récompenserai en soignant votre tenue qui a besoin d’être rectifiée. »