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LES CAHIERS

vous pourrez dormir ; la soupe se fait ; demain il n’y paraîtra plus. »

L’Empereur remonta dans son palais ; à cinq heures, on nous mit sur notre séant pour nous faire manger la soupe, de la viande, du pain et du bon vin. À neuf heures, l’Empereur descendit pour nous voir, il dit aux officiers de nous faire lever, mais il fallait deux hommes pour nous promener ; les jambes étaient raides. L’Empereur tapait des pieds de colère, les grenadiers se moquaient de nous et nos officiers n’osaient se faire voir par crainte d’être mal reçus. Le soir, on nous donna des logements dans ce beau village très riche ; toute la garde arriva et fut bien logée.

Le bombardement de Vienne avait cessé, nos troupes avaient pris la capitale : les armées d’Autriche avaient fait sauter les ponts après avoir passé de l’autre côté du Danube. On prit toutes les mesures pour recommencer ; il fallait aller les trouver et se faire un passage sur ce terrible fleuve qui avait augmenté et était d’une force effrayante ; l’eau était à pleins bords ; on eut de la peine à maintenir les grosses barques avec des ancres, il fallait des bateaux assez forts pour établir un pont d’une longueur démesurée, avec un courant si rapide. Tous ces préparatifs demandèrent du temps ; l’Empereur fît descendre ces grandes barques à trois lieues, dit-on, au-dessous de Vienne, en face de l’île Lobau et la