Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/346

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Lorsque ce chef d’état-major eut jeté un coup d’œil sur mon rapport, il me prit à l’écart : « Où sont-ils, vos soldats ? — Ils m’ont abandonné à Witepsk avant d’entrer en ville, au moment où je partais au galop prendre des ordres sur la route que je devais suivre pour vous rejoindre ; ils sont partis dans la joie de rejoindre leur corps plus vite. Quant aux soixante-deux fusillés, ce ne sont pas des Français. — Mais vous avez souffert avec ces traînards. — J’ai sué du sang, général. — Je vais vous présenter au maréchal. — Je le connais et il me connaît, lui ; il ne rira pas en me voyant, comme vos officiers ; ils m’ont bien blessé. — Allons, mon brave, ne pensons plus à cela ! Venez avec moi, je vais tout concilier. »

Il arrive près de ses officiers : « Vous allez mener ce brave à ma tente ; faites-le rafraîchir, je vais chez le maréchal, car il nous apporte du nouveau ; vous verrez cela tout à l’heure, je vous rejoins dans l’instant. »

Il revient, et me prenant le bras devant ses officiers qui étaient bien sots : « Venez, me dit-il, le maréchal veut vous voir. »

Le maréchal, voyant mon uniforme, dit : « Vous êtes un de mes vieux grognards. — Oui, mon général. C’est vous qui m’avez fait mettre des jeux de cartes dans mes bas afin que je sois assez grand pour être admis dans les grenadiers que vous commandiez à cette époque.