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moyennant 300 francs de pension par an. Moi, je pris de suite mon parti. J’allais à Mouffy m’installer pour un mois, mettre mes morceaux de vigne en bon état, me disant que si j’y dépensais mes économies, je pourrais toujours vivre avec mes 73 francs par mois. Comme mes deux hommes de journée, je faisais trembler le manche de ma pioche ; dans un mois, mes petits morceaux de vigne étaient dans l’état parfait. Je ne le cédais pas à mes deux vignerons, je leur montrais que le soldat pouvait reprendre la charrue. Mes pauvres mains avaient de fortes ampoules, mais je me déchaînais contre l’ouvrage, disant : « J’ai passé par de plus grosses épreuves. Je vous ferai voir, mes enfants, que la terre doit nourrir son maître. »

Je m’en revins à Auxerre pour des affaires plus sérieuses, je m’étais dit : « Il faut prendre un parti, il faut te marier ; tu ne peux plus rester garçon, maintenant qu’il t’est permis de former un établissement, mais avant tout il faut la trouver. » À qui me confier ? Je fus faire visite à M. More qui était un de mes dignes amis, je le fréquentais depuis 1814. J’étais toujours bien reçu. Il avait une parente pour fille de boutique qu’il appelait toujours : ma cousine ; je l’avais distinguée à cause de son activité au commerce, mais je ne disais mot ; le temps m’en fournit l’occasion. Cette aimable demoiselle trouva un petit fonds de commerce, et sans rien dire de