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Page:Colet - Enfances celebres, 1868.djvu/174

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faire une comédie ; elles en choisirent le sujet, en composèrent le plan, et en firent tous les vers sans l’aide de personne. C’était une pièce suivie en cinq actes, et dans laquelle toutes les règles d’alors étaient observées. Elles la jouèrent elles-mêmes deux fois avec d’autres acteurs de leur âge. On réunit grande compagnie pour les entendre et chacun s’étonna que ces enfants eussent pu faire un aussi long ouvrage. On y trouva des traits charmants. La cour et la ville en parlèrent, et Jaqueline, qui n’avait pas dix ans, devint un enfant célèbre en poésie comme l’était déjà dans la science son jeune frère Blaise.

La reine Anne d’Autriche, qui résidait au château de Saint-Germain, voulut voir la petite muse. Mme de Morangis, amie de la famille Pascal et qui était de la cour, se chargea d’y conduire Jaqueline. De Paris à Saint-Germain c’était alors tout un voyage ; un carrosse de la reine y mena la petite fille célèbre, accompagnée de Mme de Morangis. La reine était grosse de l’enfant qui fut depuis Louis XIV. Jaqueline composa sur cette circonstance un sonnet où elle célébrait les espérances que la France fondait sur ce prince encore à naître. Arrivée à Saint-Germain, elle fut introduite dans le cabinet de la reine, qui, entourée d’une suite nombreuse, reçut Jaqueline avec bonté et prit de ses mains les vers qu’elle avait composés. Mais en les entendant, la reine s’imagina que ces vers n’étaient pas d’une enfant si jeune, ou du moins qu’on lui avait beaucoup aidé. Tous ceux qui étaient présents eurent la même pensée. Alors Mademoiselle (qui fut plus tard la grande Mademoiselle) s’approcha de Jaqueline et lui dit : » Puisque vous faites si bien les vers, faites-en pour moi. » Aussitôt Jaqueline