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les chevaux plats et roux jaillissaient en lignes rebelles sur le front. Toute son allure était celle d’un séminariste plein de flamme ; quand la belle femme artiste se montrait à table dans une toilette qui lui rendait sa jeunesse, Adolphe de Chaly faisait des bonds sur sa chaise et dardait ses yeux louches sur mon amie ; parfois il interpellait l’Italien pour lui faire admirer Nérine, mais jamais il ne put lui arracher sur elle que ces paroles :

— C’est un noble esprit, je sais qu’elle aime l’Italie où elle a longtemps séjourné.

— Vous devriez vous lier avec elle, lui disait l’écolier et me présenter.

Mais l’Italien hochait la tête et répondait :

— Je ne suis plus de ce monde.

Quand il nous rencontrait à la promenade, Nérine et moi, il nous saluait en devenant plus pâle ; c’était tout.

Il n’en était pas de même de l’étrange écolier ; il cherchait toujours à nous parler et s’offrait pour nous rendre mille petits services.

Un matin nous le rencontrâmes, Nérine et moi, dans le carrefour le plus touffu de la promenade de Grammont, dont les sentiers s’échelonnent au-dessus d’un des grands rocs qui emprisonnent les Eaux-Bonnes. Nous tenions chacune à la main une énorme