Page:Colet - Les Derniers Marquis - Deux mois aux Pyrénées - 1866.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 237 —

n’a retiré que son corps tout meurtri et méconnaissable.

— Et lui ? demandai-je.

— Lui est tombé aussi, peut-être pour la secourir : il a eu les jambes cassées et la tête ouverte ; l’on assure qu’en ce moment il se meurt.

— C’est bien horrible et bien douloureux, lui dis-je.

— C’est une honte pour le pays, reprit la servante, et monsieur le maire en est tout contristé.

Le mourant, le séducteur, était un fonctionnaire public, et avant tout, le maire déplora le scandale de cette catastrophe. Mais les années passeront et jetteront sur cette aventure la teinte mélancolique et romanesque du temps. L’intérêt s’attachera aux deux amants de la Roche-Percée comme à ceux de la Grotte d’Amour, Ils bravèrent la mort pour se voir, pour s’aimer, et ce sentiment qui couronne leur ombre survivra à la vulgarité des commentaires ; j’en suis certaine, les siècles transformeront en légende cette mort tragique dont j’ai été presque le témoin. En attendant, ce ne furent durant tout un jour à Biarritz que propos dénigrants et rigoristes contre les deux pauvres victimes. C’est le propre de l’esprit français ; il commence toujours par railler les catastrophes de l’amour. Que de quolibets gaulois durent