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un autre camée plus grand du même corail fermait son col en valenciennes. Elle semblait ravie d’elle-même et sûre de nous écraser toutes par son élégance et sa jeunesse ; cependant quand le vieux magistrat de Pau assis à la gauche de Nérine demanda galamment de ses nouvelles à sa belle voisine, comme il appelait mon amie, et que celle-ci lui répondit avec grâce de sa voix timbrée, la petite marquise leva son nez pointu et parut décontenancée en voyant cette vraie et simple beauté qui, malgré l’âge et la souffrance, gardait encore une extrême puissance.

La robe de chambre en cachemire bleu que portait Nérine flottait comme un péplum sur sa taille de Vénus de Milo, et ses beaux cheveux dorés, relevés et réunis vers la nuque, se gonflaient en molles ondulations autour de son front inspiré.

— C’est une femme artiste, murmura avec un demi-sourire de dénigrement la petite marquise à son mari.

Puis, se tournant vers le bel Italien dont elle voulait évidemment attirer l’attention, elle lui dit d’un ton hardi :

— Vous ne mangez pas, monsieur, et je le conçois bien ; tous ces mets sont détestables !

— Je ne sais s’ils sont bons ou mauvais, répondit le marquis mourant, avec l’indulgence d’un vrai