Page:Colet - Les Derniers Marquis - Deux mois aux Pyrénées - 1866.djvu/49

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 35 —

Malgré l’indulgence ou plutôt l’indifférence de Nérine à l’égard de la petite marquise, tout ce que le pauvre Adolphe nous avait dit sur elle était d’une rigoureuse exactitude ; elle voulait à tout prix lier une intrigue avec le bel Italien, et ne cessait de faire rage contre Nérine dont la grâce simple et l’esprit éminent la désarçonnaient à toute rencontre. À table la lutte recommençait invariablement entre ces deux natures si différentes : l’une grande et bonne, l’autre mesquine et malveillante. J’ai dit que dès le premier jour le couple des Serrebrillant avait affecté de se plaindre du service et de critiquer tous les mets. À chaque repas c’étaient des plaintes nouvelles auxquelles s’associaient complaisamment et bruyamment les époux Routier. On eût dit d’un chœur de la tragédie antique renchérissant sur les lamentations du dialogue d’un roi et d’une reine.

— Monsieur, disait alors le marquis Sigismond au fabricant de Mulhouse, si vous me faites visite dans mon château de Serrebrillant, je vous promets que vous y ferez une autre chère ! Je n’ai jamais moins de huit plats de viande, de volaille, de venaison et de poisson à chaque repas.

— C’est princier, vraiment princier ! répondait le fabricant d’un air révérencieux.