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tes ondulaient en courbes irrégulières jusqu’à la gorge des Eaux-Chaudes que nous avions traversée en venant. À gauche, dominant la vallée d’Ossau, le pic du Midi, comme le roi de tous ces rocs énormes, les dépassait de la hauteur d’un géant écrasant des nains ; c’était le point culminant de cette partie des Pyrénées que nous embrassions du regard ; les vallées ombreuses, les villages, les cultures se nichaient entre les fentes des montagnes comme les enfants se cachent dans les plis des robes maternelles ; les torrents jaillissaient des cimes neigeuses ou des sources enfouies dans les entrailles des monts ; çà et là, à côté d’un roc dénudé, des arbres aux troncs moussus suspendaient une forêt sombre ; sur les versants les plus bas s’étalaient les champs de maïs ; des vaches et des troupeaux de moutons paissaient sur les pelouses.

Le soleil éblouissant répandait une lumière diverse sur les crêtes inégales des montagnes. Quelques sommets resplendissaient et semblaient en feu, tandis que, dans les défilés étroits, formés par des rocs perpendiculaires, ses rayons se perdaient dans le gouffre d’une ombre noire. Sur les carrières de marbre blanc, éventrées au milieu de quelque mont, jaillissait une pluie d’étincelles qui semblaient pétiller sur une nappe de neige. Au-dessus de l’eau des gaves,