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violent et soudain de les relire s’empara de moi. J’en tirai plusieurs au hasard d’une cassette où je les renfermais ; et à mesure que les expressions de cette tendresse calme, mais toujours égale, me pénétraient, je sentais revenir en moi la sérénité ; il m’aime ! répétais-je avec de douces larmes, et dans cette confiance je puisais la force de tout dire à Albert ; j’étais prête à confesser mon amour comme les premiers chrétiens confessaient leur foi.

En ce moment j’entendis la voix d’Albert. Marguerite l’avait rencontré dans l’escalier et allait l’introduire dans mon cabinet. Mon premier mouvement fut de cacher les lettres de Léonce ; tout à coup il me vint une autre idée et je laissai les lettres éparses sur ma table.

Albert entra ; il était un peu pâle, mais sa mise très-recherchée lui donnait une apparence de santé.

— Vous vouliez donc venir chez moi, me dit-il en m’embrassant ; cette bonne pensée que vous m’avez envoyée m’a guéri et c’est moi qui viens vous voir et vous remercier. — Mais, chère, êtes-vous malade ? ajouta-t-il en me regardant, vous voilà blanche et glacée comme un beau marbre. Vous avez encore des larmes dans les yeux, pourquoi pleurez-vous ? je veux le savoir !

— Eh bien ! oui, m’écriais-je, vous saurez tout. Albert, écoutez-moi sans colère et ne me retirez pas votre amitié ; plusieurs fois déjà j’ai voulu parler et vous n’avez pas voulu m’entendre ; Albert je, ne puis