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Page:Colet - Promenade en Hollande.djvu/171

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PROMENADE EN HOLLANDE.

que intrigue romanesque et platonique. Cela commence presque toujours par les promenades dans les rues et le jeu des miroirs ; puis viennent les rencontres dans les jardins publics et dans les églises, enfin les présentations dans les salons aristocratiques, qui amènent les rapprochements désirés.

Il y a huit ans, à l’époque où se passa cette histoire, les deux plus charmants étudiants de l’Université de Leyde étaient sans contredit Raynold et Hermans. Le premier était plus sentimental que le second. Tous deux étaient beaux, intelligents, et appartenaient à de riches familles. Tous deux s’éprirent à la fois de la belle Sulpicia, et ce fut un défi et une lutte à qui l’obtiendrait. Ils restèrent camarades tout en étant rivaux, car chacun d’eux était plein d’espérance ; ils étaient reçus dans les maisons où allait la jeune fille, et ils le furent bientôt chez elle. Elle les traita avec une égale tyrannie rieuse et enlaçante ; les irritant de la parole, les agaçant du regard, les enivrant du sourire, et les tenant constamment en laisse comme deux beaux lévriers avec lesquels on se plaît à jouer. Quand son institutrice lui demandait : « Lequel aimez-vous ? » elle répondait : « Je n’en sais rien, mais je veux me les soumettre tous les deux ; il sera toujours temps de me prononcer un jour. » Et la dangereuse enfant redoublait de séductions et d’empire. Chaque matin elle s’éveillait avec un esprit plus vif, plus provo-