Page:Colette - La maison de Claudine, 1922.djvu/29

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renoué vingt fois. Elle nous regarde, tour à tour, sans espoir. Elle sait qu’aucun de nous ne lui donnera un avis utile. Consulté, papa répondra :

— Des tomates crues avec beaucoup de poivre.

— Des choux rouges au vinaigre, eût dit Achille, l’aîné de mes frères, que sa thèse de doctorat retient à Paris.

— Un grand bol de chocolat ! postulera Léo, le second.

Et je réclamerai, en sautant en l’air parce que j’oublie souvent que j’ai quinze ans passés :

— Des pommes de terre frites ! Des pommes de terres frites ! Et des noix avec du fromage !

Mais il paraît que frites, chocolat, tomates et choux rouges ne « font pas un dîner »…

— Pourquoi, maman ?

— Ne pose donc pas de questions stupides…

Elle est toute à son souci. Elle a déjà empoigné le panier fermé, en rotin noir, et s’en va, comme elle est. Elle garde son chapeau de jardin roussi