Page:Collectif (famille Chauviteau) - 1797-1817 Lettres de famille retrouvées en 1897, 1897.djvu/223

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Le jeudi soir, Mamita avait reçu l’extrême-onction et la sainte communion avec sa ferveur et son calme accoutumés ; elle priait en silence et tenait entre ses doigts son petit crucifix.

Le lundi soir 19 janvier, la respiration était extrêmement pénible, la suffocation incessante. Vers 8 heures du soir la faiblesse augmentait. Séraphine et Thérèse, Ferdinand, Thomas, Philippe et Monnier étaient réunis dans la chambre, agenouillés près du lit ; on commença les prières des agonisants ; le râlement si pénible, la respiration si bruyante cessèrent. Mamita resta calme et silencieuse, et, les prières achevées, elle rendit en paix le dernier soupir.

Thérèse resta auprès d’elle, lui fit sa dernière toilette, peigna et coupa elle-même ces cheveux aimés qu’elle baisa avec respect et contempla la première avec amour et vénération ce cher visage délivré des angoisses de l’agonie, et, reprenant cette beauté d’une paix sereine qui avait été le partage de cette âme d’élite tous les jours de sa vie.

Le 22 janvier, anniversaire de la mort de Bon-Papa, elle fut conduite au Père-Lachaise, auprès des cendres de celui dont elle avait si dignement porté le nom et conservé la mémoire, depuis cinquante-huit ans qu’elle était restée veuve, sur soixante-dix-huit ans de mariage. Elle avait quatre-vingt-quatorze ans et avait vu naître soixante-dix-huit enfants et petits-enfants, dont quatre de la cinquième génération.

SOUVENIRS

Depuis longtemps déjà, plus d’une année au moins, notre chère Bonne-Maman ne pouvait plus aller à l’église ; sa cécité lui rendait l’assistance à la messe assez difficile, et elle ne pouvait, sans grande fatigue, faire des sorties matinales pour recevoir la sainte communion, comme elle y avait été si longtemps fidèle. Son confesseur, l’abbé Roquette, venait la voir régulièrement, depuis qu’elle ne pouvait plus aller le trouver elle-même à Saint-François-Xavier, où elle l’avait suivi, lorsqu’il quitta les Missions-Étrangères ; bien des années elle avait fait cette longue course avec une stricte régularité. Quand elle dut