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Page:Collectif - Miss Edith Cavell. Eugène Jacquet, 1916.pdf/19

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Discours de Mme Séverine


Monsieur le Président de la République,
Mesdames, Messieurs,


Entre ce maître de la conscience qu’est M. Ferdinand Buisson et ce maître de la science qu’est M. Painlevé, permettez-moi, pour parler d’une femme, de parler seulement en femme.

M. le Président de la Ligue des Droits de l’Homme a retracé, avec trop de précision et d’éloquence, la carrière de miss Edith Cavell pour qu’il soit permis d’y beaucoup revenir. Mais l’éclat, le retentissement de cette mort tragique, en éblouissant le monde des plus vives lueurs de la pitié, ont peut-être empêché de démêler à quel point elle était un aboutissant naturel, une conclusion prévue, et que cette vie admirable ne pouvait accéder qu’à une pareille fin. Comme le sillon très droit mène au bout du champ, cette existence d’impeccable logique, d’infaillible rectitude, traçait le chemin vers cette mort.

Edith Cavell n’en pouvait avoir d’autre : sa mémoire eût été incomplète, comme gâchée par le destin, s’il n’y eut eu, autour de sa coiffe d’infirmière, l’auréole tremblante et resplendissante du martyre.

Elle l’a risqué consciemment, ce martyre : elle en avait peut-être la soif secrète — comme l’ont tous ceux qui se vouent à de grands apostolats.

Regardez plutôt ce ferme et fin visage, ce front lumineux, ces yeux de rêve, cette bouche sincère.

Tout en elle dit la confiance, tout en elle dit la ferveur. Une ferveur un peu grave, quasi-puritaine, et qu’elle dut avoir toujours. On se la représente