Page:Collectif - Revue canadienne, Tome 1 Vol 17, 1881.djvu/587

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RÉFLEXIONS GÉNÉRALES.

Généralement les États-Unis n’offrent pas un intérêt bien varié pour le voyageur qui veut s’instruire. On a beau faire des centaines de lieues, toujours on rencontre la même langue, les mêmes mœurs et les mêmes coutumes ; la nature seule attire une attention soutenue, parce que l’œuvre de Dieu impose quand même par sa grandeur ou attire par sa simplicité. Le passé compte pour peu de chose dans le nouveau continent ; il est d’hier et encore se confond-il nécessairement avec l’histoire de l’ancien monde, dont il n’est qu’un épisode.

Ainsi donc les réflexions qui viennent à l’esprit de l’observateur se portent plutôt sur l’avenir. Que deviendront par exemple les vastes plaines de l’Ouest qui n’ont du désert que l’apparence, sans en offrir l’insurmontable stérilité ? Quel sera le sort de ces nouveaux pays dont les progrès sont si étonnants et si rapides ? Resteront-ils toujours fondus dans la république actuelle, ou rompront-ils l’unité qu’exigent leur force et leur durée, mais que déjà le fléau de la guerre civile a ébranlée jusque dans sa base ? Dieu seul connait le sort politique des empires. Un jour peut-être, les éléments trop disparates qui s’entassent dans cette partie du monde subiront de grands changements et formeront des peuples à part. La politique et la nationalité de l’Union sont à l’état de fusion transitoire ; elles font l’effet d’un pêle-mêle inextricable où se confondent des mœurs hétérogènes et des lois qui n’ont ni assez de force, ni assez d’extension. L’extrême divergence des cultes, les goûts cosmopolites, le flot incessant de l’immigration européenne, le besoin de copier le vieux monde dans beaucoup de choses, l’immensité du territoire qui fait que chaque race peut s’étendre à son aise et conserver longtemps encore sa langue et ses coutumes respectives, font du peuple américain, un peuple hybride soumis à une prodigieuse mobilité. Sans vouloir nier le génie qui perce à travers cette masse confuse et indescriptible, on peut avancer sans crainte que ses facultés nationales n’ont pas encore acquis un caractère définitif. Ce débrouillement continuel durera aussi longtemps que l’Amé-