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bonarisme, et Rome ne lui appartiendra pas effectivement tant que le Pape y sera. Les sociétés secrètes comprennent cela mieux que qui que ce soit, et le départ de la cour du Vatican serait pour elles le plus éclatant de leurs triomphes.

Où irait se fixer la Papauté exilée ? L’Autriche offre l’un de ses palais royaux, l’Espagne donnerait Majorque, l’Angleterre proposerait peut-être le rocher de Malte. En Amérique, l’illustre exilé trouverait tous les fronts découverts, tous les bras tendus pour lui faire une réception triomphale. Mais le Pape, probablement, ne s’éloignerait pas de l’Europe et se tiendrait aussi près que possible de son poste, pour reprendre le siège de ses prédécesseurs aussitôt que les circonstances le permettraient.

Il est évident que les journaux et les agences télégraphiques exagèrent les faits. Nous n’en sommes pas encore au point de chercher un lieu de refuge pour le chef de la catholicité. Il y a certains esprits pusillanimes qui ne manquent jamais une occasion de prédire comme probable et prochain le départ du Pape. Depuis l’occupation de Rome par les troupes garibaldiennes, les mêmes rumeurs à sensation ont circulé maintes fois ; — et le Pape n’a pas bougé. L’horizon est sombre sans doute, mais rien n’est désespéré.

Le parti libéral dans la province de Québec est défait, brisé, presque anéanti. Les dernières élections lui ont porté un coup terrible. Il est réduit à la petite phalange de 1867. À peine douze ou quinze libéraux ont-ils trouvé grâce devant le peuple, ont-ils échappé à l’avalanche qui emportait leurs amis. C’est un parti tombé en faiblesse, en déchéance ; il ne se relèvera qu’avec difficulté. S’il manque de membres, il manque aussi de chefs. Nous ne voyons pas parmi ceux qui le dirigent, un homme capable de le vivifier, de le ranimer, de lui rendre ses ardeurs. Pour exercer sur l’électorat une action durable, il faut un programme, il faut des idées. Et les chefs libéraux n’ont pas d’autres idées que celles mêmes de M. Chapleau. Des cris, des clameurs contre un employé public peuvent permettre à un parleur de paraître avec quelque avantage dans les assemblées populaires d’une heure de durée, mais ne peuvent renverser un ministère. C’est donner la meilleure preuve que l’on a rien à reprocher à un cabinet que de garder le silence sur ses principaux actes politiques et son administration, pour ne s’attaquer qu’au caractère de l’un de ses employés. L’approbation tacite du reste s’infère d’elle-même.

La lutte a été mal engagée et mal conduite par le parti