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libéral. Ce fut dû un peu peut-être à des défectuosités d’organisation, ce fut dû aussi à des défauts d’entente sur les principes, à des désaccords internes. Les conservateurs, unis en une seule phalange, ont su profiter des avantages de la position ; le deux décembre, les noms de cinquante de leurs candidats sortaient vainqueurs des urnes électorales.

Le dépouillement officiel des scrutins nous a valu des surprises cette année. Dans trois comtés, la majorité a tourné, Kamouraska avait placé M. Gagnon en minorité de six voix ; le juge Taschereau en annulant certains bulletins admis, et en en admettant d’autres rejetés, a rendu le mandat à l’ex-député par une voix de majorité. Verchères avait légitimement donné trente-six de majorité de M. Brillon, conservateur ; au dépouillement des bulletins son adversaire a eu treize voix de surplus. M. Bernatchez, candidat libéral de Montmagny, se trouvait à avoir battu son adversaire, M. Fortin, par seize voix ; au dépouillement M. Fortin avait bel et bien quatre voix de majorité.

Ce dernier cas — celui de Montmagny — est resté jusqu’à présent sinon inexplicable du moins inexpliqué. On en est aux suppositions. Les libéraux du comté accusent leurs adversaires d’avoir ouvert après la votation les boîtes du scrutin et d’avoir opéré une substitution de bulletins. L’accusation est d’un caractère extrêmement grave ; jusqu’à présent la preuve n’en a pas été donnée.

À Verchères, autre chose. Un sous-officier-rapporteur opérant dans la paroisse de Varennes a posé sur chaque bulletin le numéro du votant. L’expression d’opinion faite par l’électeur ne se trouvait pas changée, mais le secret n’existait plus. La loi, interprétée dans son sens sévère, annule un bulletin qui porte toute autre marque que la croix réglementaire. L’officier électoral a-t-il agi par ignorance ou par fraude ? Les présomptions sont malheureusement contre lui : outre sa qualité de libéral, il avait déjà exercé deux ou trois fois les fonctions de scrutateur au même endroit sans commettre aucune faute semblable.

Ces deux « scandales » sont l’objet de vifs commentaires, — chacun des deux parties ayant à accuser dans un cas et à se défendre dans l’autre. On a touché du doigt les défectuosités de notre système de votation et la présente législature ne devra pas se dissoudre sans avoir tenté d’y porter remède. Si ces deux fraudes sont prouvées, il faudra gémir sus notre immoralité politique.


Le procès de Guiteau n’est pas terminé ; les scènes burlesques se succèdent régulièrement, et les éclats de rire