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Page:Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions, et romans cabalistiques, tome 29, 1788.djvu/18

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Voyage

à la terre du comte de Sélincourt : la paix laiſſant à nos guerriers le loiſir de prendre du repos, rien ne leur paroît plus nouveau & plus doux que les plaiſirs de la campagne. Vous ſavez, madame, que cette terre doit une de ſes grandes beautés à la rivière de Seine, ſur le bord de laquelle elle eſt ſituée : vous n’ignorez pas auſſi qu’elle a des avenues magnifiques, des eaux admirables, de beaux jardins, des bois, dont les rayons du ſoleil ont peine à pénétrer l’aimable obſcurité ; que les appartemens du château font ſuperbes, tant pour leur grandeur, que pour les meubles dont ils ſont ornés. Vous ſavez encore, madame, que la chère qu’on y fait eſt délicate & bien entendue, & que l’ordre brille par-tout dans ce lieu délicieux : mais une choſe dont vous ne vous ſouviendrez peut-être pas, quoique vous l’ayiez mieux ſçu qu’une autre, c’eſt que le comte eſt très-aimable, qu’il a de grands cheveux blonds & naturellement friſés, dont la quantité prodigieuſe lui deſcend juſqu’à la ceinture ; qu’il a le viſage agréable, & que ſon air eſt galant & noble ; pour de l’eſprit, il en a infiniment ; mais il ſe rend un peu trop maître des converſations ; il ne répond pas juſte à la penſée d’autrui ; il ne brille que ſur la ſienne ; il parle trop haut, décide trop librement des réputa-