Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/696

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En cheminant vers mon hôtel, je passai à l’extrémité du square où logeait mistress Catherick. Fallait-il retourner chez elle, tenter encore d’y être admis ? Non. Cette nouvelle de la mort de sir Percival, — la dernière, bien certainement, qu’elle pût s’attendre à recevoir, — avait dû lui parvenir depuis déjà plusieurs heures. Le journal de la localité, dans son numéro du matin, n’avait pas manqué de publier le procès-verbal de l’enquête. Je ne pouvais donc rien dire à cette femme, dont elle ne fût déjà informée. D’ailleurs, je ne me sentais plus le même intérêt à la faire parler… Je me rappelai la haine cachée qu’exprimait son visage, au moment où elle me disait : — « En fait de nouvelles de sir Percival, je n’attends plus avec quelque intérêt que celle de sa mort. » Je me rappelai cette curiosité furtive avec laquelle, au moment où je partais, elle m’examinait après avoir prononcé ces paroles. Une sorte d’instinct, au plus profond de mon cœur, instinct auquel je savais pouvoir me fier, me rendait souverainement répugnante la pensée de me retrouver en sa présence ; — je tournai donc le dos au square, et rentrai directement à l’hôtel.

Quelques heures plus tard, tandis que je me reposais dans la « coffee-room, » une lettre me fut remise par le garçon. L’adresse perlait bien mon nom, et j’appris, en réponse à quelques questions, qu’elle avait été déposée au comptoir de l’hôtel, par une femme, au moment où le jour tombait, et avant que le gaz fût allumé. Cette femme n’avait pas ouvert la bouche, et s’était retirée avant qu’on pût lui parler, ou même regarder qui elle était.

J’ouvris la lettre. Elle ne portait ni date ni signature, et l’écriture était visiblement déguisée. Néanmoins, avant que j’eusse achevé la première phrase, je savais à quoi m’en tenir sur l’origine de ce document. Il me venait de mistress Catherick.

La lettre portait ce qui suit ; — je la copie exactement, mot pour mot :