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dans leurs effets : la cuisinière faisait une mine à croire qu’elle eût voulu rôtir M. Seegrave tout vivant dans son four, et toutes ses camarades le regardaient comme si, en ce cas, elles en eussent volontiers mangé un morceau !

Les recherches achevées, et bien entendu sans qu’on eût retrouvé le moindre atome du diamant, l’inspecteur se retira dans ma chambre pour mieux peser ce qu’il lui restait à faire. Lui et ses hommes venaient de passer des heures dans la maison, sans que l’affaire eût avancé d’un pouce. Ils n’avaient recueilli aucun indice ni sur la manière dont le vol avait été commis, ni sur la personnalité du voleur.

Pendant que l’agent mûrissait ainsi de nouveaux projets, M. Franklin me fit demander dans la bibliothèque.

Au moment où j’ouvrais la porte de cette pièce, quelle ne fut pas ma surprise de la sentir poussée du dedans, et d’en voir sortir Rosanna Spearman !

Lorsqu’on avait balayé et rangé dans la bibliothèque, et cela dès le matin, ni la première ni la seconde housemaid n’avaient quoi que ce soit à y voir à aucune autre heure du jour. J’arrêtai Rosanna et lui fis un reproche de cette dérogation à toutes les coutumes de la maison.

« Qu’est-ce qui peut vous amener dans la bibliothèque à cette heure de la journée, lui demandai-je ?

— M. Franklin Blake avait laissé tomber dans sa chambre une de ses bagues, et je suis entrée dans la bibliothèque pour la lui remettre. »

Elle rougissait tout en me faisant cette réponse, et elle me quitta avec un air de tête et une affectation d’importance que je ne m’expliquai pas. Toutes les servantes avaient été plus ou moins révolutionnées par ce qui s’était passé dans la maison ; mais aucune n’avait perdu le sens commun, qui paraissait faire défaut à la tête de Rosanna Spearman.

Je trouvai M. Franklin en train d’écrire. Il me demanda tout d’abord un moyen pour se transporter au chemin de fer. Au premier son de sa voix, je me vis en présence du côté résolu et pratique de l’individu, l’homme de coton avait disparu : c’était l’homme de fer qui était maintenant assis devant moi.

« Vous allez à Londres, monsieur ? demandai-je.

— Je vais y télégraphier, me répondit M. Franklin. J’ai