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CHAPITRE XXII


J’eus le loisir après le départ de ma maîtresse de m’occuper du sergent Cuff. Je le trouvai assis bien à l’aise dans un coin du hall, consultant son agenda et retroussant malicieusement les coins de sa bouche.

« Vous prenez quelques notes sur l’affaire ? dis-je.

— Non, répondit-il ; je regarde quel est mon plus prochain engagement.

— Oh ! fis-je, vous regardez donc le vôtre ici comme terminé ?

— Je crois lady Verinder, répondit le sergent, une des femmes les plus habiles de l’Angleterre. Je crois aussi qu’une rose est plus agréable à contempler qu’un diamant. Où est le jardinier, monsieur Betteredge ? »

Il n’y eut pas moyen d’en tirer un seul mot de plus à propos de la Pierre de Lune ; il semblait ne plus porter le moindre intérêt à l’enquête, et il persista à ne s’occuper que du jardinier. Une heure après, je les entendis derechef disputer à haute voix dans la serre, et sur l’éternel sujet de l’églantier.

J’eus ensuite à demander à M. Franklin s’il comptait toujours nous quitter par le train de l’après-midi ; après qu’il eut appris les détails et le résultat de la conférence tenue chez milady, il se décida à attendre les nouvelles de Frizinghall. Ce changement de projet, si simple et sans importance, pour tout autre, tourna tout différemment pour M. Franklin. Il eut pour effet de le laisser incertain, inoccupé, et avec tout le loisir imaginable pour aider ses billevesées étrangères à ressortir de son cerveau comme feraient des rats cherchant à s’échapper d’un sac.

Tour à tour Anglo-Italien, Anglo-Allemand et Anglo-Français, il ne fit qu’entrer dans chaque pièce et en sortir, sans parler d’autre chose que des procédés de miss Rachel envers