Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 1.djvu/51

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perdue pour vous à jamais… Que veut dire cette clause ? »

Ici, j’eus, à ce que je crus au moins, un éclair digne de la vivacité étrangère.

« Je comprends, dis-je, c’était un moyen de diminuer la valeur du diamant, et ainsi de tromper les calculs de ces coquins !…

— Rien de tout cela, reprit M. Franklin ; je me suis enquis de cette question. Comme le diamant restant dans son intégrité est déparé par une paille, s’il était coupé en morceaux, il vaudrait plus d’argent, ainsi divisé, que sous sa première forme, et cela par la simple raison que les quatre ou six diamants qu’on en tirerait seraient bien plus parfaits que l’énorme pierre déparée par un défaut.

« Donc, si le vol seul avait été au fond de la conspiration, les instructions du colonel n’eussent servi absolument qu’à rendre le larcin plus tentant. On en eût trouvé une somme plus importante, et il eût été d’une défaite plus facile après l’opération que lui eussent fait subir les ouvriers d’Amsterdam.

— Dieu vous bénisse, monsieur ! m’écriai-je, mais alors, qu’était donc ce complot ?

— Un complot organisé parmi ceux des Indiens qui possédaient primitivement le joyau, répondit M. Franklin, et dont l’origine remonte à une antique superstition hindoue. Telle est mon opinion, corroborée par la lecture d’un papier de famille que j’ai sur moi en ce moment. »

Je compris alors pourquoi l’apparition des trois Indiens avait frappé M. Franklin comme un fait digne de remarque.

« Je ne tiens pas, reprit M. Franklin, à vous imposer mon opinion personnelle.

« L’hypothèse de quelques sectaires hindous profondément dévoués à une croyance religieuse, bravant toutes les difficultés, tous les dangers, et guettant sans se lasser l’occasion de ressaisir leur joyau sacré, m’apparaît à moi comme parfaitement d’accord avec la patiente ténacité des races orientales, et ce que nous savons de l’influence des religions asiatiques ; mais je conviens que je suis un homme d’imagination, et que le boucher, le boulanger et le percepteur des contributions ne sont pas les seules réalités qu’admette mon esprit. Laissons mes conjectures pour ce qu’elles valent, et revenons à la seule question pratique qui nous concerne. La