Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/180

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une opinion arrêtée, dis-je ; je ne puis qu’adopter la vôtre, et je suis persuadé que vous avez raison.

— Fort bien. Voici maintenant ce que je vous demanderai ; vous et moi nous sommes convaincus ; mais comment faire partager cette conviction aux autres personnes ? »

J’indiquai du geste les deux manuscrits. Ezra Jennings fit un signe négatif.

« C’est inutile, monsieur Blake ! parfaitement inutile ! et cela pour trois raisons péremptoires. D’abord ces notes ont été écrites dans des conditions entièrement en dehors des usages habituels : voilà qui s’élève déjà contre elles ! En second lieu, ces notes émanent d’une théorie toute neuve et de l’ordre métaphysique aussi bien que de l’ordre médical : autre inconvénient ! Enfin, ces notes sont mon œuvre personnelle, et mon témoignage est la seule garantie de leur authenticité ; veuillez vous rappeler le récit que je vous fis sur la lande, et demandez-vous ensuite quelle autorité peut avoir mon témoignage ! Non, en regard du verdict de l’opinion, mes notes ne peuvent servir qu’à une chose. Votre innocence doit être établie, et elles nous indiquent le moyen de la faire reconnaître. Il faut que notre conviction subisse une épreuve décisive, et c’est vous-même qui prouverez votre non-culpabilité.

— Et comment cela ? »

D’un mouvement rapide il se pencha vers moi à travers la table qui nous séparait.

« Consentiriez-vous à essayer une expérience hardie ?

— Je me soumettrais à n’importe quelle épreuve pour me justifier des soupçons qui pèsent actuellement sur moi.

— Vous résigneriez-vous à une gêne personnelle pendant un certain temps ?

— J’affronterai n’importe quelle incommodité !

— Voulez-vous vous en remettre exclusivement à moi ? Je vous exposerai peut-être à être tourné en ridicule par les sots, vous aurez à subir les représentations de ceux de vos amis dont vous êtes habitué à respecter les opinions.

— Dites-moi ce que je devrai faire, interrompis-je avec impatience, et, quoi qu’il arrive, je le ferai.

— Voici ce que vous ferez, monsieur Blake, me répondit-il ; vous volerez le diamant, sans vous en douter, pour la