emprunter un liard sur les propriétés, de quelque nature qu’elles fussent, mobilières et immobilières ; ils auraient de beaux revenus, la jouissance de la maison de Londres et de celle du Yorkshire, mais rien de plus.
Lorsque j’eus appris ce que je voulais savoir, je fus fort embarrassé pour agir.
Depuis huit jours à peine, j’avais été informé des projets d’union de miss Verinder, et cette nouvelle m’avait causé une surprise mêlée de tristesse. Mon amitié et mon estime pour elle m’avaient fait éprouver un chagrin sérieux en la voyant tomber aux mains de M. Godfrey Ablewhite. Eh quoi ! maintenant, cet homme, que j’avais toujours considéré comme un mielleux hypocrite, justifiait la pire opinion que je pusse concevoir de lui et dévoilait le but intéressé de son mariage ! Quand ce serait vrai, me direz-vous, cela ne se voit-il pas tous les jours ? Je vous l’accorde, mon cher lecteur. Mais prendriez-vous la chose aussi légèrement, s’il s’agissait, laissez-moi le supposer, de votre fille ou de votre sœur ?
La première considération à examiner pour moi fut celle de savoir si M. Godfrey Ablewhite tiendrait son engagement, en apprenant ce que son avoué avait découvert pour lui.
Cela dépendait entièrement de sa position pécuniaire, qui m’était inconnue. S’il ne se trouvait pas dans une situation tout à fait désespérée, miss Verinder avec son revenu seul était encore un fort beau parti pour lui. Si, au contraire, il avait absolument besoin de réaliser une somme importante dans un délai donné, alors le testament de lady Verinder atteignait son but et préservait sa fille de devenir la femme d’un gredin pareil.
Cette dernière possibilité admise, il était inutile d’affliger miss Rachel dès les premiers temps de son deuil, en lui apprenant une triste vérité. Mais si ma première prévision venait à se vérifier, je risquais par mon silence de laisser s’accomplir un mariage qui pouvait faire le malheur de toute sa vie.
Dans le doute, je me rendis à l’hôtel où demeuraient Mrs Ablewhite et miss Verinder. Ces dames m’apprirent qu’elles partaient le lendemain pour Brighton et qu’un obstacle imprévu empêchait M. Godfrey de les accompagner ; je résolus aussitôt de prendre sa place. Tant que je n’avais fait