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Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/92

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caisse de plomb et des deux chaînes à chien, la conviction arrêtée du sergent que Rosanna avait caché quelque chose aux Sables, et son ignorance absolue de ce que cela pouvait être : toutes ces circonstances me revinrent nettement à l’esprit, pendant que nous nous dirigions tous deux le long de ces rochers bas qu’on nomme la Broche du Sud.

Avec l’aide encore de Betteredge, je trouvai bientôt la place d’où je pouvais voir la balise de la pointe et le drapeau de la côte sur une même ligne. Dociles aux indications du mémorandum, nous posâmes ma canne dans la direction voulue aussi fermement que nous le pûmes, eu égard aux inégalités que présentait la surface des roches, puis nous regardâmes nos montres et attendîmes.

Il s’en fallait environ de vingt minutes que la marée commençât à descendre. Je proposai d’attendre sur la berge de sable au lieu de rester sur ces roches mouillées et glissantes. Arrivés au sable sec, je m’apprêtai à m’asseoir et je pensais que Betteredge en ferait autant, lorsqu’à ma grande surprise je le vis se préparer à me quitter.

« Pourquoi vous éloignez-vous ? lui dis-je.

— Relisez la lettre, monsieur, et vous le saurez. »

Un coup d’œil jeté sur ce papier me rappela en effet qu’on me recommandait d’opérer mes recherches à moi tout seul.

« Il est un peu dur pour moi de vous quitter en ce moment ; dit Betteredge ; mais cette malheureuse fille a eu une cruelle mort, et je me crois tenu à respecter son dernier caprice. D’ailleurs, ajouta-t-il confidentiellement, rien dans cette lettre ne vous oblige à m’en faire un secret ensuite. Je vais rester dans le bois de sapins jusqu’à ce que vous me rejoigniez. Seulement ne tardez pas plus longtemps qu’il ne le faudra, monsieur ; la fièvre d’enquête est une maladie difficile à gouverner dans des circonstances comme celles-ci. »

Là-dessus, il me quitta.

Si court que fût le temps que j’avais à attendre, l’impatience me le fit paraître horriblement long. Dans des cas semblables, l’habitude de fumer est une précieuse ressource. J’allumai un cigare et je m’assis sur la berge.

Le soleil répandait son éclat sur tous les points environnants, et rien qu’à respirer la délicieuse fraîcheur de l’air, on se sentait heureux de vivre. La solitaire petite baie elle-