Page:Collins - Le Secret.djvu/199

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Rien de plus vrai. L’oncle Joseph exerçait la fascination de ses familiarités sur la bonne en question (laquelle, au lieu de retourner dans la cuisine, était restée à contempler les nouveaux venus), justement comme il l’avait exercée, dans la diligence, sur la dame âgée placée à côté de lui, et, plus tard, sur le postillon de la chaise qui les avait amenés à Porthgenna. Tandis que la femme de charge et l’intendant tenaient à part leur conférence secrète, il avait mis en gaieté la jeune Betsey, qui retenait à grand’peine ses rires près d’éclater, par les étranges questions qu’il lui faisait, et sur l’intérieur de la vieille maison, et sur les fonctions qu’elle avait à y remplir. Sa petite enquête les avait conduits du côté sud, par lequel Sarah et lui étaient entrés, au côté ouest, qu’ils allaient bientôt explorer, et, de là, au côté nord, terrain prohibé où personne ne mettait jamais le pied. Lorsque mistress Pentreath s’avança, escortée de l’intendant, elle surprit un fragment de l’interrogatoire que l’étranger faisait subir à la domestique.

« Mais voyons donc un peu, chère Betzi, disait l’oncle Joseph, pourquoi personne ne va-t-il jamais dans ces vieux appartements moisis ?

— Parce qu’un fantôme les habite, répondit Betsey, riant tout haut, comme si une enfilade de chambres hautes et une série de facéties excellentes étaient deux choses parfaitement identiques.

— Voulez-vous bien vous taire, et retourner en bas ? » s’écria mistress Pentreath, indignée. Puis s’adressant à Sarah, mais l’œil toujours fixé sur l’oncle Joseph : « Les ignorants du voisinage, continua-t-elle, racontent d’absurdes histoires sur certains vieux appartements situés dans une partie de la maison qu’on a laissée tomber en ruine, et qui n’a pas été habitée depuis tantôt un demi-siècle ; d’absurdes histoires où il est question d’un fantôme : et ma domestique est assez sotte pour y croire.

— Vraiment non, répliqua Betsey, qui, tout en protestant, opérait sa retraite vers les régions souterraines… Je ne crois pas le moins du monde au fantôme… du moins pendant la journée. »

Après cette clause restrictive, énoncée à voix basse, Betsey, bien à regret, disparut de la scène.

Mistress Pentreath observa, non sans étonnement, que la mystérieuse dame à la mise tout unie était devenue très-pâle dès qu’on avait parlé du fantôme, et ne s’était pas permis la moindre remarque. Pendant qu’elle se demandait encore ce