Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 2, trad Du Bois, 1845.djvu/373

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Il faudra bien se souvenir de fixer, dans les canaux qui donnent passage aux eaux de la piscine, des grilles de cuivre à petites ouvertures, afin que le poisson ne puisse pas s’échapper. Si l’espace le permet, il ne sera pas sans utilité de disposer, dans l’intérieur du réservoir, quelques rochers du rivage, surtout de ceux qui sont revêtus d’algues, et de figurer une mer véritable autant que le génie de l’homme peut parvenir à cette imitation, afin que les captifs s’aperçoivent le moins qu’il est possible, de la privation de leur liberté.

[7] Ces réservoirs étant ainsi préparés, on y introduira le troupeau aquatique. Un point très important et qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est, dans cette affaire qui a l’eau pour objet, et comme on l’a dit en parlant des productions terrestres, d’étudier « Ce que comporte chaque contrée. » En effet, quand même nous le voudrions, nous ne pourrions nourrir dans ces viviers une aussi grande quantité de mulets qu’on en voit quelquefois dans la mer, parce que cette espèce de poisson est très délicate et aime surtout la liberté. Aussi, sur plusieurs milliers, trouve-t-on à peine un ou cieux mulets qui supportent la captivité,

[8] tandis qu’on voit fréquemment, dans ces mêmes viviers, les troupeaux marins des muges indolents et des loups rapaces. C’est pourquoi, comme je l’ai dit, on doit consulter la nature du rivage où l’on se trouve, pour savoir s’il est à propos d’admettre des rochers ou de les éviter. On jettera dans la piscine, non seulement des grives, des merles, d’avides mustelles et des loups sans tache (car il y en a qui sont bigarrés), mais aussi des lamproies que l’on prise beaucoup, des murènes et quelques espèces saxatiles dont le prix est fort élevé : car le poisson commun ne vaut pas la peine d’être nourri, ni même d’être pêché.