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HISTOIRES D’OURS

templant la masse de chair, et la puissante membrure de l’animal, je réalisai le fait que le grizzly méritait certain respect.

Je savais qu’il me serait pratiquement impossible de bouger et écorcher l’animal, seul, avant la nuit. Mais comme le lieut. Waite avait dû entendre les détonations de ma carabine, et qu’il ne devait pas être très éloigné, je tirai rapidement trois autres coups de suite de mon revolver, comme signal que j’avais besoin d’aide. Il avait, en effet, entendu mes trois premiers coups de carabine et s’était de suite douté que j’avais trouvé l’ours disparu. Il s’était alors immédiatement mis en route, dans ma direction. Mais, en entendant mes trois coups de revolver successifs, il me crut dans une impasse, et il se mit à courir, n’étant alors qu’à environ un quart de mille de moi. Quelques minutes après, je l’entendis venir. Je lui jetai un cri auquel il répondit. Je m’assis sur l’ours, et je sortis un cigare que je réservais pour l’heure du lunch et je l’allumai.

En débouchant du bois, il lança un hourra, et, s’avançant, il me serra la main, en me félicitant de mon heureux coup. Puis, il se mit à examiner les environs, pendant que je lui racontais les détails de mon exploit.

— Eh bien, dit-il, Friend Labradorian (mon ami du Labrador), — c’était mon surnom avec eux —, c’est bien bon de fumer un cigare à présent, mais ça me paraît manquer un peu de naturel. Je voudrais bien pouvoir vous passer un miroir de poche pour juger vous-même. Ceci provoqua un éclat de rire, suivi d’une nouvelle poignée de main.

Pendant que j’étais à enlever la peau d’un côté, le lieutenant voulut bien aller chercher nos chevaux pour transporter la peau et un peu de la viande de l’animal à notre camp, vu que le ravin était assez