Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 001, 1835.djvu/149

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rités et des citoyens zélés, pensèrent devoir le soumettre à l’attention des ingénieurs de tous les pays. Divers plans furent présentés. Le gouvernement cantonnal donna la préférence à celui de M. Challey, de Lyon. En définitive, c’est le plan de notre compatriote qui a été exécuté, sous sa direction immédiate.

Les portes, d’ordre dorique, par lesquelles on entre sur le pont, ont 20 mètres (60 pieds) de hauteur totale, avec une élévation de voûte de 13 mètres, sur une ouverture de 6. La largeur de la maçonnerie est de 14 ; son épaisseur de 6. Quoiqu’on n’ait employé dans ces constructions que des blocs très volumineux de roche calcaire dure du Jura, il a paru nécessaire de les unir fortement par des crampons métalliques. Plus de 25000 kilogrammes de fer ont servi à cet usage.

La largeur de la vallée de la Sarine, dans le point où le pont est construit ; ou, si l’on veut, la distance des faces intérieures des portes élevées sur les deux rives ; ou, enfin, car c’est encore la même chose en d’autres termes, la longueur totale du pont est de 265 mètres  (817 pieds ). Tout le monde concevra qu’on ait hésité à franchir une pareille distance d’un seul jet, et que la pensée de soutenir le pont par son milieu, se soit d’abord présentée à l’esprit de M. Challey. Néanmoins, la difficulté d’établir solidement une pile de près de 200 pieds de hauteur, au fond d’une vallée d’alluvion, fit bientôt renoncer à la division projetée. Le pont n’a donc qu’une seule travée : une travée de plus de 265 mètres !

Le plancher est suspendu, par des moyens connus aujourd’hui de tout le monde, à quatre câbles en fil de fer qui passent sur la partie supérieure des deux portes. Chacun de ces câbles se compose de 1200 fils d’environ 3 millimètres de diamètre et de 347 mètres  de longueur. Comme de telles masses auraient été très difficiles à manœuvrer et à tendre, on a placé séparément les élémens dont elles se composent. Leur réunion s’est opérée en l’air, par des ouvriers qui travaillaient suspendus, et, hâtons-nous de le dire, sans qu’il soit jamais arrivé le moindre accident. On a calculé que les quatre câbles réunis, pourraient porter bien près de 3000000 de kilogrammes (60000 quintaux anciens).

Les quatre câbles trouvent leurs points d’attache, sur l’une et l’autre rive, au fond de quatre puits creusés dans la colline. Dans chacun de ces puits, ils traversent une cheminée cylindrique verticale qui unit trois voûtes massives superposées, encastrées elles-mêmes avec un soin infini dans les rochers environnans ; c’est plus bas qu’ils s’amarrent enfin à des blocs de pierre très dure, de deux mètres cubes. Les câbles ne pourraient donc