Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 001, 1835.djvu/487

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dans cet ouvrage, et qui se rapportent aux quatre époques récentes où la législation a été différente : aux années antérieures à 1831, à cette année 1831, aux années postérieures, et enfin à l’époque actuelle.

» Avant 1831, la probabilité qu’un juré ne se trompait pas dans son vote était un peu au-dessous de pour la France entière, et un peu au-dessus de cette fraction pour le département de la Seine en particulier. Le sens précis de ce résultat du calcul et de l’observation est que, si l’on eût pris au hasard un très grand nombre de jurés, 10000 par exemple, et qu’on leur eût soumis les affaires criminelles de toutes natures qui se jugent en France, pendant plusieurs années, au nombre de 500000[sic] pour fixer les idées, les trois quarts du produit de 10000 et de 50000[sic] exprimeraient, à très peu près, le nombre des votes de condamnation ou d’acquittement qu’on doit regarder comme vrais, c’est-à-dire, condamnant des accusés coupables, ou absolvant des accusés dont la culpabilité n’était pas assez probable pour rendre leur condamnation nécessaire. Malgré une plus grande expérience des procès criminels que les juges ont sans doute, leur chance de ne pas se tromper dans leurs votes est cependant peu différente de celle des jurés, du moins dans les cas les plus douteux où la majorité du jury ne s’est formée qu’à sept voix contre cinq. En effet, ces cas se sont présentés au nombre de 1911 pendant les cinq années écoulées depuis 1826 jusqu’à 1830 ; la Cour d’assises, composée alors de cinq conseillers, et appelée, dans ce cas, à intervenir, s’est jointe 314 fois à la minorité du jury ; or, elle aurait dû s’y joindre seulement 291 fois, en supposant la probabilité de ne pas se tromper égale pour les jurés et pour les juges ; et quoique ces deux nombres 314 et 291 ne soient pas assez considérables pour décider à quel point cette hypothèse peut s’écarter de la vérité, leur peu de différence suffit pour prouver qu’il doit en exister aussi fort peu entre les chances d’erreur des juges et des jurés. La chance d’erreur de ceux-ci ne provient donc pas, comme on pourrait le croire, de leur défaut d’habitude : il y a lieu de penser que sa cause principale est l’arbitraire qui reste dans la conscience de chacun, juge ou juré, sur le degré de probabilité nécessaire pour qu’un homme en condamne un autre.

» Le calcul combiné avec l’observation, montre aussi qu’en France la probabilité qu’un accusé est coupable, quand il paraît devant les cours d’assises, pour une affaire de nature quelconque, a 0,64 pour valeur ; à Paris elle est notablement plus grande, et s’élève à 0,68 ; ce qu’on doit regarder comme un fait, qui pourrait tenir à l’habileté des magistrats, ou