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Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 001, 1835.djvu/491

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gements, que je n’ai pas besoin de qualifier, qui ont été rendus en très grand nombre par les tribunaux extraordinaires, pendant les temps malheureux de la révolution ; mais à cet égard il est indispensable d’entrer dans quelques explications afin qu’il ne reste aucun doute sur la généralité et l’exactitude de la théorie. La difficulté que ce cas d’exception présente n’a point échappé à des personnes qui voulaient bien écouter avec intérêt les résultats de mon travail.

» Un accusé peut être condamné, ou parce qu’il est coupable, et que les juges ne se trompent pas, ou parce qu’il est innocent, et que les juges se trompent. Le rapport du nombre des condamnations à celui des accusés ne varie pas lorsque la probabilité que l’accusé est coupable avant le jugement, et celle de l’erreur du vote de chaque juge, se changent l’une et l’autre dans leurs compléments à l’unité. Il demeure le même, par exemple, quand ces probabilités sont et , et quand elles ne sont que et . Il a aussi une même valeur, lorsqu’elles diffèrent toutes deux très peu de la certitude, ou de l’unité, et lorsqu’elles sont toutes deux presque nulles ; et dans ces cas extrêmes, le nombre des condamnations s’écarte très peu de celui des accusations. Par cette raison les équations qu’il faut résoudre pour déterminer les grandeurs de ces deux probabilités sont toujours susceptibles de deux solutions réelles et inverses l’une de l’autre. Toutefois, chacune de ces deux solutions a un caractère qui la distingue : en adoptant l’une, la probabilité qu’un accusé condamné est coupable sera plus grande que celle de son innocence ; le contraire aura lieu en adoptant l’autre. Dans les cas ordinaires, c’est donc la première solution qu’on doit choisir, car il ne serait pas raisonnable de supposer que les tribunaux fussent injustes ou jugeassent le plus souvent au rebours du bon sens. Mais il n’en est pas de même quand les jugements sont rendus sous l’influence des passions ; ce n’est plus alors la racine raisonnable des équations, c’est l’autre solution qu’il faut employer, et qui donne aux condamnations une si grande probabilité d’injustice. C’est ainsi que cette anomalie sociale, de tribunaux dont la plupart des jugements sont erronés, se trouve comprise dans la généralité des formules algébriques. Dans cette théorie, l’iniquité du juge et la passion de l’accusateur sont considérées comme des causes d’erreur, aussi bien qu’une trop grande pitié ou un excès d’indulgence ; et le calcul est établi sur le résultat des votes, quels que soient les motifs qui les ont dictés.

» Dans les tribunaux de police correctionnelle, le rapport du nombre des acquittements à celui des accusés est compris entre 0,14 et 0,15, d’après la