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Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 002, 1836.djvu/64

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s’exerce, doit trop souvent, si ce n’est toujours, avoir une influence analogue sur les résultantes qu’elle produit ; et l’on peut déjà en voir les effets dans ces beaux phénomènes de capillarité que M. Savart a découverts, où l’eau, mise en mouvement près des termes de température dans lesquels sa polarité moléculaire est la plus sensible, se courbe en nappes subitement variées de volume et de forme, par le seul changement d’une fraction de degré du thermomètre centésimal. Que l’on imagine maintenant de semblables forces, s’exerçant de plus près entre des groupes moléculaires de nature diverse, et les forçant brusquement en un seul système, avec des mutations soudaines d’état relativement à tous les agents impondérables, on aura les combinaisons chimiques, c’est-à-dire des phénomènes près desquels ceux de la précession des équinoxes ne sont que des jeux d’enfants. Remonter de ces effets complexes aux lois simples des forces élémentaires qui les produisent, semble être un problème mille fois plus difficile que celui que Newton a résolu ; et pourtant c’est le problème de la chimie.

« Au milieu de cette complication inévitable, puisqu’elle est attachée à l’étendue même des masses sensibles sur lesquelles nous opérons, on voit, dans beaucoup de cas, apparaître une propriété physique qui offre toute la simplicité de l’attraction à de grandes distances. C’est le pouvoir qu’ont certains liquides de dévier les plans de polarisation des rayons lumineux proportionnellement à leur épaisseur. Car, en analysant cet effet, on trouve qu’il résulte d’une action propre exercée individuellement par les groupes moléculaires qui se rencontrent sur le trajet, et dans la sphère d’activité du rayon transmis ; action égale pour tous les groupes si le liquide est homogène, et produisant aussi des déviations successives égales, parce que le plan de polarisation de chaque rayon simple se montre également déviable après avoir été dévié. Alors la déviation angulaire finie et totale éprouvée par ce plan à travers une épaisseur mesurable du liquide actif, est la somme des déviations infiniment petites, successivement opérées par les groupes moléculaires que le rayon a rencontrés dans son trajet. En dégageant cette somme des particularités de réfrangibilité, de densité et de longueur, pour la ramener à des éléments toujours comparables, on en déduit une valeur angulaire proportionnelle à la déviation infiniment petite que produirait un seul groupe moléculaire constituant du liquide, agissant dans un état physique constant sur un même rayon. Cette valeur réduite est ce que j’ai appelé le pouvoir rotatoire moléculaire des corps.

Un caractère spécial de ce pouvoir, caractère que sa définition exige,