Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 042, 1856.djvu/129

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remplir une autre mission ; son point de vue serait différent, et son jugement s’étendrait sur des conséquences qui ne sont pas ici de notre domaine. Nous croyons devoir nous borner à la statistique traitée comme une science d’observation physique et mathématique, en la dégageant des théories, des systèmes dont ses travaux peuvent être ensuite le sujet.

L’auteur constate trois conditions d’existence chez les populations européennes. À l’orient, c’est le régime qu’il appelle des engagements forcés. Ce régime impose le travail à l’ouvrier d’après des conditions fixées par la loi et par la fortune. En même temps il soumet le patron à l’obligation de pourvoir en toute éventualité aux besoins de l’ouvrier et de sa famille ; il attribue à ce dernier une véritable hypothèque légale sur les produits du travail.

Au nord, au centre, le régime des engagements volontaires prend en grande partie la place des engagements forcés ; mais il faut encore que des institutions protectrices concilient (nous citons toujours les expressions de l’auteur) concilient la liberté nécessaire aux individualités les plus distinguées, avec la protection dont ne sauraient se passer les classes placées, sous le rapport de la moralité, de l’intelligence et de l’énergie, à un niveau moins élevé. Ici la tradition et les mœurs suppléent à la loi, qui n’est plus impérative, pour assurer le meilleur sort des ouvriers.

Le troisième et dernier régime est celui des engagements momentanés. Dans ce régime, les biens et les maux semblent mélangés chez diverses nations et dans les diverses provinces d’une même nation, suivant les progrès des arts et de l’industrie.

Aux yeux de l’auteur, ce nouvel ordre de choses semble envahir fatalement toutes les régions industrielles de l’occident, en même temps qu’un progrès incontestable se manifeste à sa suite dans toutes les branches de l’activité humaine.

Après avoir ainsi nettement posé les divisions de son sujet, il établit avec raison cet axiome : Les réformes que commande la situation actuelle des ouvriers doivent être fondées sur la connaissance des faits qui les concernent. C’est l’objet du second paragraphe de son introduction

Mais comment parvenir à cette connaissance ?

L’auteur signale et fait contraster deux méthodes. La première, celle des statisticiens, a, selon lui, jusqu’à ce jour, pour base principale les documents numériques fournis par l’autorité publique en ce qui concerne les finances, la guerre, la justice, etc. ; les statisticiens en déduisent des moyens de comparer sous divers rapports la puissance relative des États.