Page:Comte - Discours sur l’esprit positif.djvu/27

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Non seulement nos recherches positives doivent essentiellement se réduire, en tous genres, à l’appréciation systématique de ce qui est, en renonçant à en découvrir la première origine et la destination finale ; mais il importe, en outre, de sentir que cette étude des phénomènes, au lieu de pouvoir devenir aucunement absolue, doit toujours rester relative à notre organisation et à notre situation. En reconnaissant, sous ce double aspect, l’imperfection nécessaire de nos divers moyens spéculatifs, on voit que, loin de pouvoir étudier complètement aucune existence effective, nous ne saurions garantir nullement la possibilité de constater ainsi, même très superficiellement, toutes les existences réelles, dont la majeure partie peut-être doit nous échapper totalement. Si la perte d’un sens important suffit pour nous cacher radicalement un ordre entier de phénomènes naturels, il y a tout lieu de penser, réciproquement, que l’acquisition d’un sens nouveau nous dévoilerait une classe de faits dont nous n’avons maintenant aucune idée, à moins de croire que la diversité des sens, si différente entre les principaux types d’animalité, se trouve poussée, dans notre organisme, au plus haut degré que puisse exiger l’exploration totale du monde extérieur, supposition évidemment gratuite, et presque ridicule. Aucune science ne peut mieux manifester que l’astronomie cette nature nécessairement relative de toutes nos connaissances réelles, puisque, l’investigation des phénomènes ne pouvant s’y opérer que par un seul sens, il est très facile d’y apprécier les conséquences spéculatives de sa suppression ou de sa simple altération. Il ne saurait exister aucune astronomie chez une espèce aveugle, quelque intelligente qu’on la supposât, ni envers des astres