Page:Comte - Discours sur l’esprit positif.djvu/51

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duquel les volontés se produisent. Or, ce fondement préalable ne saurait provenir que d’un être au moins égal, jugeant ainsi par similitude ; on ne peut le concevoir de la part d’un inférieur, et la contradiction augmente avec l’inégalité de nature. Aussi la théologie a-t-elle toujours repoussé la prétention de pénétrer aucunement les desseins providentiels, de même qu’il serait absurde de supposer aux derniers animaux la faculté de prévoir les volontés de l’homme ou des autres animaux supérieurs. C’est néanmoins à cette folle hypothèse qu’on se trouverait nécessairement conduit pour concilier finalement l’esprit théologique avec l’esprit positif.

Historiquement considérée, leur opposition radicale, applicable à toutes les phases essentielles de la philosophie initiale, est généralement admise depuis longtemps envers celles que les populations les plus avancées ont complètement franchies. Il est même certain que, à leur égard, on exagère beaucoup une telle incompatibilité, par suite de ce dédain absolu qu’inspirent aveuglément nos habitudes monothéiques pour les deux états antérieurs du régime théologique. La saine philosophie, toujours obligée d’apprécier le mode nécessaire suivant lequel chacune des grandes phases successives de l’Humanité a effectivement concouru à notre évolution fondamentale, rectifiera soigneusement ces injustes préjugés, qui empêchent toute véritable théorie historique. Mais, quoique le polythéisme, et même le fétichisme, aient d’abord secondé réellement l’essor spontané de l’esprit d’observation, on doit pourtant reconnaître qu’ils ne pouvaient être vraiment compatibles avec le sentiment graduel de l’invariabilité des relations physiques, aussitôt qu’il a pu acqué-