Page:Comte - Discours sur l’esprit positif.djvu/63

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sagesse universelle. Aussi, bien loin de jamais remettre en question ce que celle-ci a vraiment décidé, les saines spéculations philosophiques doivent toujours emprunter à la raison commune leurs notions initiales, pour leur faire acquérir, par une élaboration systématique, un degré de généralité et de consistance qu’elles ne pouvaient obtenir spontanément. Pendant tout le cours d’une telle élaboration, le contrôle permanent de cette vulgaire sagesse conserve d’ailleurs une haute importance, afin de prévenir, autant que possible, les diverses aberrations, par négligence ou par illusion, que suscite souvent l’état continu d’abstraction indispensable à l’activité philosophique. Malgré leur affinité nécessaire, le bon sens proprement dit doit surtout rester préoccupé de réalité et d’utilité, tandis que l’esprit spécialement philosophique tend à apprécier davantage la généralité et la liaison, en sorte que leur double réaction journalière devient également favorable à chacun d’eux, en consolidant chez lui les qualités fondamentales qui s’y altéraient naturellement. Une telle relation indique aussitôt combien sont nécessairement creuses et stériles les recherches spéculatives dirigées, en un sujet quelconque, vers les premiers principes, qui, devant toujours émaner de la sagesse vulgaire, n’appartiennent jamais au vrai domaine de la science, dont ils constituent, au contraire, les fondements spontanés et dès lors indiscutables ; ce qui élague radicalement une foule de controverses, oiseuses ou dangereuses, que nous a laissées l’ancien régime mental. On peut également sentir ainsi la profonde inanité finale de toutes les études préalables relatives à la logique abstraite, où il s’agit d’apprécier la vraie méthode philosophique, isolément d’aucune applica-