Page:Conan - Elisabeth Seton, 1903.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
ÉLISABETH SETON

l’est aussi le commandant. Celui-ci parait maintenant me comprendre un peu ; il m’a encore répété : « J’aimais ma femme, je l’aimais, et elle est morte ; e che volete, Signora. » — Causé avec les Filicchi, de l’autre cédé de la grille. Quelle difficulté j’ai eue pour ramener mon William jusqu’en haut de l’escalier — soigné mon William. Fait la lecture pour lui — Écouté Anna — Rangé, mis tout en ordre ; notre Luigi nous a apporté un élégant bouquet de jasmins, de géraniums et d’œillets. Il sait faire des soupes excellentes. Il fait tout cuire sur du charbon, dans une petite marmite. Point de soleil à l’heure du couchant. Un vent impétueux ; il aurait certainement renversé nos murailles, si quelque chose pouvait les renverser. Les mugissements de la mer semblables au tonnerre. Passé cette soirée comme la précédente ; mais tout à fait réconciliée avec les verrous, les barreaux et la sentinelle en faction. Mon flambeau ne me fait plus peur ; d’ailleurs, autour de nous, il n’y aurait rien à brûler que le volet de la fenêtre. »


Mercredi, 23 novembre.

« Non seulement je suis résolue à porter ma croix, mais je l’ai baisée. Mais à ce même moment, tandis que je rendais gloire à Dieu de ses consolations, mon pauvre William a été pris d’une crise presque au-dessus de ses forces. Il m’a dit, comme déjà plusieurs fois, qu’il n’y avait plus rien à faire pour lui, que ses forces s’affaiblissaient d’heure en heure ; qu’il s’en allait et qu’il n’irait pas loin. Ceci pour moi seule. Avec ses amis, il est tout à fait gai. Il n’est plus en état d’aller jusque vers eux ; on les admet au seuil de notre porte. Le bout du bâton de notre capitano avertit mon pauvre William de demeurer à distance, au moindre mouvement qu’il fait vers eux dans l’ardeur de la conversation. C’est tout à fait comme dans mon enfance, quand on allait voir les lions. Un des gardiens a