Page:Conan - Physionomies de saints, 1913.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
PHYSIONOMIES DE SAINTS

restait à contempler sa future demeure, quand un personnage, qui semblait l’un des premiers officiers du palais, s’approchant du portail, dit à ceux qui le suivaient : L’évêque Troïle a renoncé à la divine récompense pour ravoir ses trente livres d’or. Au nom du monarque de l’univers, arrachez cette inscription.

Ce rêve jeta l’effroi dans l’âme de l’avare. Il le raconta humblement au patriarche et, soutenu par ses prières, devint aussi compatissant, aussi libéral qu’il avait été dur et avare.

« Soyez charitable, disait souvent le saint à ses serviteurs, soyez charitable, et jamais Dieu ne vous abandonnera ». Lui ne pouvait, sans fondre en larmes, voir pleurer ceux qui étaient dans l’affliction. Il avait la commisération infinie du cœur, une pitié sans bornes des souffrances, des détresses impuissantes des petits et des humbles.

Suivant un usage établi par saint Paul, l’évêque jugeait alors les différends qui s’élevaient entre chrétiens. Le bienheureux savait que ceux qui sont opprimés par des personnes puissantes n’osent pas toujours demander justice ; aussi, deux fois la semaine, il donnait publiquement audience. Tous les mercredis et les vendredis, on lui mettait un siège devant les grandes portes de l’église ; il allait attendre là ceux qui voulaient lui parler et, afin d’encourager les plus timides, il n’avait auprès de lui qu’un seul officier. Il écoutait avec bonté tous ceux qui se présentaient et leur donnait satisfaction sans délai.

Il arriva un jour que personne ne se présenta à son audience. Le saint en fut affligé et, après avoir longtemps attendu, se retira les larmes aux yeux. L’un de ses prêtres lui demanda la cause de cette tristesse.

« — C’est qu’aujourd’hui je n’ai rien à offrir à Jésus-Christ en expiation de mes péchés, répondit le patriarche.

— Très-saint père, répliqua le prêtre, il me semble