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PHYSIONOMIES DE SAINTS

les choses de la cour d’Avignon. Il s’entretenait souvent avec elle, la consultait, et la conduisit en plein consistoire.

La confiance dont le pape l’honorait ne tarda pas à inquiéter vivement la cour pontificale. Et cette jeune fille, qui devait trancher l’éternelle question romaine, vit son action entravée par toutes sortes d’intrigues, d’hostilités. Comme plus tard les juges de Jeanne d’Arc, les prélats français la tentaient dans sa foi. Ils la poursuivaient avec leurs interrogatoires perfides sur les subtilités de la théologie jusqu’au fond de sa cellule.

Si grande, si visible était l’influence de Catherine sur Grégoire XI que le roi de France s’en alarma. Pour retenir le Pape sur les bords du Rhône, il lui députa son frère, le duc d’Anjou.

Mais Catherine parlait avec une autorité souveraine.

« Ô doux Christ de la terre, disait-elle au jeune pontife, vous êtes le vrai Père et Pasteur ; il faut retourner au plus vite à la ville que vous tenez des apôtres Pierre et Paul… Vous savez qu’en prenant l’Église pour épouse, vous vous êtes engagé à affronter pour elle tous les périls… Ne craignez rien des vents furieux qui se sont élevés… Ne craignez rien de ces enfants dénaturés qui se sont révoltés contre vous… N’écoutez pas ces démons incarnés qui mettent tout en œuvre pour vous retenir ici… Allez, ô Évêque de Rome, allez à votre épouse qui vous attend pâle et mourante… Allez sans tarder ou craignez la colère et les jugements de Dieu… Je vous le dis au nom de Jésus crucifié ».

La parole inspirée de la vierge de Sienne séduisait et violentait l’âme faible mais noble de Grégoire.

Il avait beaucoup réfléchi aux maux de l’Église ; il voyait dans le retour à Rome une solution à bien des difficultés et là-dessus les avertissements de tous genres ne lui avaient pas manqué.