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silhouettes canadiennes

Le gouverneur-général s’y trouvait. À la nouvelle de l’irruption, il perdit la tête et sa faiblesse aggrava étrangement l’horrible catastrophe. Il tint les troupes sur la défensive, il ordonna de ne pas s’exposer et par sa veulerie les Iroquois paradèrent en vainqueurs où il leur plût.

« Il n’y eut de chocs que sur quelques points, dit Garneau. Ces barbares parcouraient le pays laissant partout des traces sanglantes de leur passage. Ils se portaient rapidement d’un lieu à un autre et cédaient lorsqu’ils rencontraient de la résistance pour se répandre là où ils n’en trouvaient point. Ils se promenèrent ainsi pendant deux mois et demi avec le fer et la flamme, comme un incendie qu’excite un vent qui change sans cesse de direction. »

Ce que souffrirent nos ancêtres pendant ces dix semaines de sanglantes parades, il est impossible aujourd’hui de s’en faire quelque idée.

La honte de l’inaction s’ajoutait à l’horreur du péril. Jusque-là, aux heures les plus désespérées, les plus terribles, la Nouvelle-France avait fièrement gardé l’honneur. La force de cette faiblesse avait fait l’étonnement et l’admiration des Sauvages qui, maintenant, n’avaient plus que du mépris.

Aux alentours de Montréal, ils s’amusaient à torturer les prisonniers, ils avaient nargué et battu un détachement, mis tout le village de Lachenaye à feu et à sang.

Un sentiment d’amère et accablante humiliation se mêlait aux angoisses de tous les instants.

Le Canada était presque une colonie militaire ; dans les recensements on comptait les armes[1], comme dans les rôles d’une armée. Cinq cents hommes, dit un contemporain auraient mis les Iroquois en déroute. Mais Denonville tenait

  1. Garneau.