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louis hébert

banés à Québec, qu’il ferait pendre les auteurs du complot. Les femmes et les enfants allaient lui demander pardon, et tous protestaient de leur attachement pour les Français.

Pendant ce temps, grandes furent sans doute les angoisses de Louis Hébert. Bien des fois il dut songer à ce que lui avaient dit ses amis de Paris.

Heureusement, le Frère Pacifique s’employa si bien auprès de Laforière, que le projet de destruction avorta. Le chef persuada aux sauvages que le massacre des Français ne serait d’aucune utilité à la nation, qu’il valait bien mieux faire la paix avec eux. Et, chargés de présents, les Algonquins-Montagnais vinrent à Québec offrir des réparations pour le meurtre commis[1].

Avec quel intérêt Louis Hébert dut suivre l’éclosion du printemps, le renouveau charmant dans la forêt vieille comme le monde. C’est l’âme en fête sans doute que cet agriculteur de race reprit ses travaux ; mais d’amères épreuves l’attendaient.

Les marchands de la Compagnie n’avaient point tardé à reconnaître en lui un colon sérieux. Or ils ne voulaient voir dans le Canada qu’un pays de traite.

D’après Sagard, malgré tous leurs engagements, ils n’avaient pas encore défriché un demi arpent. La courageuse initiative d’Hébert alarma donc leur insatiable cupidité, et notre premier colon se heurta désormais à un mauvais vouloir implacable.

À force d’ennuis, de tracasseries, de vexations, de persé-

  1. Sur l’avis du Père Le Caron, le jugement définitif des coupables fut réservé à Champlain. Quand l’affaire lui fut soumise, à son retour, celui-ci décida que, tout considéré « il valait mieux couler le cas à l’amiable et passer les choses doucement, les sauvages étant gens sans raison, faciles à s’estranger et fort prompts à la vengeance ».