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L’Institut de la Congrégation fut approuvé en 1698. Quand la Sœur Bourgeoys eut enfin obtenu de se démettre de la charge de supérieure, elle dit à ses filles, avec l’incompréhensible humilité des saints : « Maintenant, il n’est plus question de parler de moi que comme d’une misérable qui pour n’avoir pas été fidèle dans l’emploi qui m’avait été si amoureusement confié, mérite de très grands châtiments, qui s’augmenteront encore par la peine que mon relâchement vous a fait ressentir. C’est pourquoi je vous demande le secours de vos prières. »

Délivrée des terribles peines d’esprit qui l’avaient torturée si longtemps, elle acheva sa vie dans l’action de grâces. Dieu semblait se plaire à exaucer même ses désirs.

Malgré son âge et ses austérités, sa santé était parfaite, mais le 1er janvier 1700, apprenant que l’une de ses religieuses était à l’extrémité, elle se plaignit à Dieu : « Oh ! Seigneur, dit-elle, que ne me prenez-vous, moi, inutile à tout, au lieu de cette chère Sœur qui peut rendre de si grands services ! »

Contre toute espérance, la mourante se ranima, elle revint promptement à la santé. La sainte fondatrice, saisie des plus cruelles douleurs, comprit que sa prière était exaucée et malgré ses extrêmes souffrances, qui lui arrachaient parfois des cris, une immense joie inonda son cœur. Le passage terrible n’eut rien d’amer pour cette âme déjà céleste.

Comme François d’Assise, Marguerite Bourgeoys pouvait dire : « J’ai servi mon Dieu avec courage » et comme lui aussi elle chantait souvent et invitait celles qui l’entouraient à chanter. Elle mourut le 12 janvier 1700, et comme elle expirait, son visage extraordinairement altéré s’illumina d’une splendeur radieuse.