frayeur qu’elles conservent, & qui se réveille toujours à la vue de leur ennemi. Si l’on rejette toutes ces suppositions, je ne vois pas ce qui pourroit les porter à prendre la fuite.
Peut-être me demandera-t-on qui leur a appris à reconnoître les cris qui sont les signes naturels de la douleur : l’expérience. Il n’y en a point qui n’ait éprouvé la douleur de bonne heure ; & qui, par conséquent, n’ait eu occasion d’en lier le cri avec le sentiment. Il ne faut pas s’imaginer qu’elles ne puissent fuir qu’autant qu’elles auroient une idée précise du péril qui les menace : il suffit que les cris de celles de leur espèce réveillent en elles le sentiment d’une douleur quelconque.
§. 41. On voit que, si, faute de mémoire, les bêtes ne peuvent pas, comme nous, se rappeller d’elles-mêmes, & à leur gré, les perceptions qui sont liées dans leur cerveau, l’imagination y supplée parfaitement. Car, en leur retraçant les perceptions