Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/99

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pouvoir n’a lieu qu’autant que, par l’analogie des signes que nous avons choisis, & par l’ordre que nous avons mis entre nos idées, les objets que nous voulons nous retracer tiennent à quelques-uns de nos besoins présens. Enfin, nous ne sçaurions nous rappeller une chose qu’autant qu’elle est liée, par quelque endroit, à quelques-unes de celles qui sont à notre disposition. Or un homme qui n’a que des signes accidentels & des signes naturels n’en a point qui soient à ses ordres. Ses besoins ne peuvent donc occasionner que l’exercice de son imagination. Ainsi il doit être sans mémoire.

§. 40. Delà on peut conclure que les bêtes n’ont point de mémoire, & qu’elles n’ont qu’une imagination dont elles ne sont point maîtresses de disposer. Elles ne se représentent une chose absente qu’autant que, dans leur cerveau, l’image en est étroitement liée à un objet présent. Ce n’est pas la mémoire qui les conduit dans un lieu où, la veille,