Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/20

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agita toutes les parties de son corps. Sa langue, fort flexible, se replia d’une manière extraordinaire & prononça un mot tout nouveau. Le besoin continuant donna encore lieu aux mêmes effets : cet enfant agita sa langue comme la première fois, & articula encore le même son. Les parens surpris, ayant enfin deviné ce qu’il vouloit, essayèrent, en le lui donnant, de répéter le même mot. La peine qu’ils eurent à le prononcer fit voir qu’ils n’auroient pas été d’eux-mêmes capables de l’inventer.

Par un semblable moyen, ce nouveau langage ne s’enrichit pas beaucoup. Faute d’exercice, l’organe de la voix perdit bientôt, dans l’enfant, toute sa flexibilité. Ses parens lui apprirent à faire connoître ses pensées par des actions : manière de s’exprimer, dont les images sensibles étoient bien plus à sa portée que des sons articulés. On ne put attendre que du hasard la naissance de quelque nouveau mot ; &, pour en