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Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/231

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elle est telle qu’avec du talent il seroit plus aisé de les surpasser souvent, que de les égaler toujours. A la rigueur on pourroit même dire qu’il est impossible d’en donner de bonnes traductions : car les raisons qui prouvent que deux langues ne sauroient avoir le même caractère, prouvent que les mêmes pensées peuvent rarement être rendues dans l’une & dans l’autre avec les mêmes beautés.

En parlant de la prosodie & des inversions, j’ai dit des choses qui peuvent se rapporter au sujet de ce chapitre ; je ne les répéterai pas.

§. 162. Par cette histoire des progrès du langage, chacun peut s’appercevoir que les langues, pour quelqu’un qui les connoîtroit bien, seroient une peinture du caractère & du génie de chaque peuple. Il y verroit comment l’imagination a combiné les idées d’après les préjugés & les passions ; il y verroit se former chez chaque nation un esprit différent à proportion qu’il y auroit moins de commerce entr’elles.