Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/269

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et qui nous font tomber dans l’erreur. Un homme que Dieu créeroit d’un tempéramment mûr, et avec des organes si bien développés, qu’il auroit dès les premiers instans un parfait usage de la raison, ne trouveroit pas dans la recherche de la vérité les mêmes obstacles que nous. Il n’inventeroit des signes qu’à mesure qu’il éprouveroit de nouvelles sensations, et qu’il feroit de nouvelles réflexions. Il combineroit ses premières idées selon les circonstances où il se trouveroit ; il fixeroit chaque collection par des noms particuliers ; et, quand il voudroit comparer deux notions complexes, il pourroit aisément les analyser, parce qu’il ne trouveroit point de difficulté à les réduire aux idées simples dont il les auroit lui-même formées. Ainsi n’imaginant jamais des mots qu’après s’être fait des idées, ses notions seroient toujours exactement déterminées, et sa langue ne seroit point sujette aux obscurités et aux équivoques des nôtres. Imaginons-nous donc être à